dimanche 14 juin 2009

Tchéquie - Prague


Le beau temps se maintient aujourd'hui. Nous passons la matinée au Musée des Arts Déco. Dans la boutique du rez-de-chaussée, je craque pour un collier; ça ne fera jamais que le deuxième en deux jours... L'exposition temporaire du premier étage, qui termine aujourd'hui, est consacrée à Daniel et Ignàc Preisslerové, un père et un fils connus pour avoir développé l'art de la peinture sur l'envers du verre. La collection permanente située au deuxième étage est incroyablement touffue. Six salles consacrées chacune à un thème précis (le verre et la faïence, le tissu et l'habillement, l'horlogerie, l'imprimerie et la photographie, le métal...) regorgent de tant de trésors qu'il est difficile de les admirer tous. Ici comme dans beaucoup d'autres musées tchèques, il est permis de prendre des photos en échange d'un "ticket" qui coûte quelques euros. Malheureusement, l'éclairage tamisé nécessaire à la préservation de certaines oeuvres ne nous permet pas d'en profiter réellement.

Nous allons déjeuner dans un resto d'une rue adjacente, recommandé par un de mes guides pour son atmosphère bon enfant et sa très bonne cuisine tchèque à prix modique. Le Svejk ne nous déçoit pas. Je n'arrive pas à bout de mon assiette dégustation: canard + 2 sortes de viandes de porc + quenelles de pain + quenelles de patates + chou rouge et chou blanc au vinaigre, ça fait un peu beaucoup pour moi. Je vais laisser le chou. C'est lourd, le chou.

L'après-midi, comme nous avons un peu épuisé notre stock de visites culturelles, je demande à retourner à l'angle de la rue Novy Svet où, en passant avant-hier, j'avais repéré une charmante pension de famille qui aurait été très sympa à dessiner. Chouchou accepte, et au terme d'une assez longue marche, nous nous posons enfin face à U Raka. Je m'assois en tailleur dans le gravier tandis que Chouchou préfère griffonner debout. Nous restons là jusqu'à ce que la lumière commence vraiment à décliner, que j'aie fini mes contours au feutre à l'encre de Chine et que Chouchou déclare sa moitié de dessin finie "à chier".

Nous rentrons à l'hôtel en faisant un petit détour par l'île de Kampa. Juste avant le pont qui permet d'y accéder, nous tombons sur le John Lennon Wall, un grand mur couvert de graffiti politiques - très photogénique. Sur le pont même, des dizaines de cadenas fermés sont accrochés à la grille qui donne sur un petit moulin à aube. Pourquoi, mystère. Il faudra chercher sur Google.

Nous dînons de bonne heure au O'Che's avant de reprendre le chemin de Karlova et du théâtre TaFantastika. En effet, nous avons acheté des billets pour la représentation de 21h30 d'"Aspects of Alice". C'est un spectacle étrange qui mélange acteurs live, effets de lumière noire, marionnettes, film et dessin animé avec beaucoup de poésie, une pointe d'humour et une bonne dose d'érotisme. Nous adorons tous les deux.


samedi 13 juin 2009

Tchéquie - Prague


Du soleil, enfin!!! Pour fêter ça, j'ai prévu de passer la journée dehors. Nous commençons par marcher jusqu'au bas de la colline de Petrin, censée être "le repaire des amoureux". Bien entendu, il y a la queue pour prendre le funiculaire qui doit nous conduire jusqu'au sommet. Et bien entendu, une fois arrivée en haut, je ne vois pas bien ce qu'on pourrait foutre sur un banc au milieu d'une roseraie, donc nous entamons aussitôt la redescente sur l'autre versant. Au passage, nous prenons quand même quelques photos du Mur de la Faim (que l'empereur Charles IV avait fait construire pour filer du boulot aux pauvres après la grande famine de 1360) et de la Tour Eiffel locale - 299 marches sans ascenseur; ni Chouchou ni moi ne tenons à ce point à admirer la vue d'en haut.

Arrêt suivant: le bien-nommé restaurant Bellavista où, attablés en terrasse devant des pâtes quelconques mais une fois de plus très bon marché, nous promenons un regard ébloui sur les toits de Prague qui s'étendent en contrebas. Cela fait, nous entrons dans le monastère voisin de Strahov, dont nous visitons la sublime bibliothèque et le cloître attenant. Pour une fois, muette d'admiration je suis. Je n'ai pas le moindre soupçon de sentiment religieux, mais une telle dévotion envers les livres force mon respect.

Puisque Chouchou s'est trompé ce matin et a pris des tickets journée au lieu du voyage unique dont nous aurions eu besoin pour le funiculaire, nous poussons à pied jusqu'à la station de Malostranskà. Avant de descendre dans le métro, nous nous arrêtons pour boire un Coca au bord d'une petite place où le touriste semble plus rare et l'autochtone plus nombreux. C'est un endroit quelconque mais plaisant, et pour la première fois, nous avons vraiment l'impression d'être en république tchèque plutôt qu'à Disneyland.

Nous descendons à la station de Vysehrad pour visiter le cimetière du même nom, dans lequel sont enterrés beaucoup de grands artistes tchèques comme Alphonse Mucha. Et là, pour le coup, un peu de pluie (ou de brume, pardon d'insister) aurait été la bienvenue: un soleil éblouissant tue la mélancolie contemplative nécessaire pour apprécier ce genre d'endroit. Ou pour y prendre des photos un tant soit peu lugubres. Chouchou résoud le problème en passant au noir et blanc et au sépia - pas bête.

La Vlatvà (le fleuve qui traverse Prague) à notre gauche, nous remontons ensuite à pied et en métro jusqu'à la Maison qui Danse. En nous synchronisant avec les feux rouges du carrefour qu'elle surplombe, nous parvenons à faire quelques clichés qui ne soient parasités par aucune bagnole. En revanche, pour les fils électriques, ce sera Photoshop ou rien.

Le soir, fatigués par notre très longue marche, nous optons pour la solution de facilité en allant dîner au O'Che's. Goulash et knedliky (quenelles de pain) pour Chouchou, risotto au poulet et aux légumes pour moi, surf sur internet en dessert: la journée aura été presque acceptable.



vendredi 12 juin 2009

Tchéquie - Prague


Il fait un grand soleil quand nous nous réveillons ce matin. Mais le temps que nous soyons prêts à partir, la pluie s'est remise à tomber. Nous nous réfugions dans un pub voisin de l'hôtel qui a le wifi gratuit, histoire de surfer avec mon eee-PC et l'iPod Touch de Chouchou. A peine avons-nous commandé d'immenses Coca que le soleil revient. Zen, restons zen.

Nous traversons le pont Charles pour explorer le quartier de Hradcany qui se trouve à l'ouest de celui-ci. Les rues montent pas mal, mais le coin est assez joli dans le genre meringue, bien que toujours aussi blindé de touristes. Nous faisons une grande boucle en prenant des photos et vers midi, nous descendons vers le palais royal. Personnellement, le visiter ne m'intéresse pas du tout mais je sais que ça fera plaisir à Chouchou.

...On est bien mal récompensé de son altruisme parfois. Les tickets d'entrée sont valables deux jours. Autrement dit: y'a gras de trucs à voir, et je suis partie pour une fin de journée assez pénible. D'autant que Chouchou insiste pour prendre l'option B: le "Grand Tour". Pas juste les indispensables, non: la totale. Du coup, je manque arracher avec les dents la tête de l'employée qui veut absolument nous refourguer des audioguides alors que je déteste ça. Me promener en suivant les flèches avec un genre de monstrueux walkie-talkie collé à l'oreille pendant des heures, merci bien.

Une queue de plusieurs centaines de personnes serpente autour de la cathédrale Saint-Guy sous une pluie battante. Craignant sans doute pour sa vie pour ma santé mentale, Chouchou décide de zapper ce monument qui est pourtant, paraît-il, l'un des plus spectaculaires de la ville. C'est toujours ça de pris. Nous passons directement au palais même, puis à l'exposition retraçant son histoire (ah, je savais bien que j'avais pas besoin d'un audioguide pourri pour me la susurrer à l'oreille!). Tout ce que je retiens, c'est que jusqu'à ce que la Tchéquie devienne une république, on assassinait, on brûlait et on défenestrait à tout va dans le coin. Les souverains bohèmes avaient des passe-temps très sains.

Nous nous arrêtons pour déjeuner dans un des restos du palais. Déco sobre et de bon goût, carte minimaliste et prix itou. Mon "goulash dans son bateau de pain" me réconforte quelque peu. Et c'est reparti pour la suite des visites. Nous expédions rapidement la basilique Saint-Georges. Nous passons un peu plus de temps devant la collection d'art tchèque du couvent attenant, qui mélange tableaux religieux dramatiques et scènes de la vie ordinaire. Les nobles dames tirent toutes une tronche de dix pieds de long; en même temps vu leur tête, il faut les comprendre: elles sont plus moches les unes que les autres malgré leurs splendides atours.

Vient ensuite la visite de la Ruelle d'Or et de ses minuscules boutiques d'artisanat en lesquelles je place beaucoup d'espoir pour me sauver d'une mort par overdose d'ennui. Hélas, trois fois hélas! Elles vendent exactement les mêmes merdouilles que les magasins de souvenirs de la Vieille-Ville. Et la ruelle se termine par une prison moyennageuse remplie d'instruments de torture que je traverse en fixant le bout de mes Converse (j'ai l'estomac sensible et plein de goulash).

En nous dirigeant vers la visite suivante (il nous en reste encore trois à faire; j'ai un tout petit peu envie de pleurer...), nous passons devant le musée du jouet où se tient une expo pour les 50 ans de Barbie. Bien sûr, j'y entraîne Chouchou. L'expo n'est pas géniale, surtout comparée à celle de Monaco que j'avais vue avec l'Homme il y a, euh, une éternité, mais ça vaut toujours mieux qu'une collection de vierges de fer.

Lorsque nous ressortons, Chouchou a pitié de moi et déclare que nous en avons assez vu. Nous devons encore traverser les jardins du palais pour regagner la sortie. J'ai mal aux pieds et je crois que je déteste Prague. Du coup, je garde le silence pendant le chemin du retour vers l'hôtel. Il vaut mieux: je risquerais de dire des choses désagréables. Nous passons la fin de l'après-midi à surfer de nouveau depuis le pub O'Che's dont les haut-parleurs nous déversent dans les oreilles l'intégrale des Gipsy Kings.

Une fois de plus, c'est le repas du soir qui permettra de finir la journée sur une bonne note. Nous repassons chez Botanicus puis allons dîner au Hard Rock Café où, pour une fois, on nous donne une table tout de suite. En l'honneur du 38ème anniversaire de la chaîne, nous avons droit à un petit concert live fort sympathique pendant que nous mangeons. Bonne musique rock + Cobb salad et apple cobbler = requinquage garanti.


jeudi 11 juin 2009

Tchéquie - Prague


Ce voyage pourtant attendu depuis des années ne débute pas sous les meilleurs auspices. Une crise d'angoisse m'a pratiquement empêchée de fermer l'oeil cette nuit; c'est donc lessivée que je débarque à Prague avec Chouchou vers 8h du matin. Le chauffeur de taxi envoyé par l'hôtel a vingt minutes de retard, et à cause des embouteillages, il est finalement 9h30 lorsque nous arrivons au King George pour poser nos bagages.

La réceptionniste nous annonce que nous pourrons disposer de notre chambre dans une demi-heure. En attendant, nous allons faire un tour dans les rues commerçantes voisines. Presque immédiatement, nous tombons sur le Hard Rock Café local où nous effectuons nos achats traditionnels: ce sera un T-shirt noir à manches courtes avec des dragons devant pour Chouchou et un sweat zippé rouge à capuche pour moi.

Retour à l'hôtel. Notre chambre sous les toits est plutôt mignonne avec ses murs pentus et ses poutres apparentes; par contre, elle manque de lumière pour des photos et en guise de lit double, elle a deux lits jumeaux poussés l'un contre l'autre dont les matelas ne peuvent même pas se toucher à cause de la forme du cadre. Pas super pour des vacances en amoureux, mais je n'en suis plus à ça près.

Nous repartons en direction du pont Charles distant de quelques centaines de mètres à peine. Et là, c'est l'horreur: un flot de touristes tellement compact qu'on se croirait dans le métro parisien aux heures de pointe. En plus, l'endroit est défiguré par des travaux d'entretien. Mes visions d'un pont Charles désert, brumeux et romantique s'envolent à tire-d'aile. Certes, on est au mois de juin et en plein jour; pour la brume, c'était donc un peu compromis. Mais pas pour la pluie, apparemment. J'ai le moral dans les chaussettes (déjà mouillées à travers mes Converse).

Nous faisons demi-tour pour explorer la Vieille-Ville. A chaque pas, ma déception grandit. J'imaginais Prague comme une ville gothique et ténébreuse, avec des bâtiments de pierre grise sur lesquels flotteraient encore des relents d'austère atmosphère communiste. En fait, je suis entourée de façades proprettes aux couleurs de dragée. Et de millions de touristes qui s'agglutinent devant les églises ou au pied de la fameuse horloge de l'hôtel de ville.

Nous nous arrêtons pour déjeuner dans un resto bio végétarien conseillé par un de mes guides. C'est un buffet, et mis à part les crudités et les patates sautées, je ne reconnais absolument rien. Je décide quand même de tester des trucs impossibles à identifier. A part les crudités et les patates sautées, je n'aime absolument rien, et après les avoir goûtés, je suis toujours incapable d'identifier les aliments qui restent dans mon assiette. Groumpf.

Lorsque nous ressortons, il pleut à verse. Je crois même qu'il tombe de la grêle. Je veux rentrer à Bruxelles. Mais comme ce n'est pas possible, je décide qu'un peu de shopping s'impose; ça aura au moins le mérite de nous mettre à l'abri. Zlatà Lod, un chouette magasin de fournitures d'art pas chères, me réconforte temporairement. En revanche, le Tesco qui a paraît-il un super rayon papeterie est... en travaux, hé oui. Quant à Botanicus et ses produits de beauté bio, il est pris d'assaut par des hordes d'Asiatiques piaillantes qui me découragent d'acheter quoi que ce soit.

La fatigue commence à se faire sentir. Bien qu'il ne soit pas encore 15h, nous nous arrêtons au Kavarna Obecni Dùm, la brasserie de la Maison Municipale, très beau lieu Art Déco où je compense ma frustration alimentaire du midi avec un grand chocolat chaud italien et une crêpe aux fruits frais accompagnée d'une boule de glace vanille et d'une montagne de chantilly. Après ça, nous rentrons à l'hôtel faire la sieste. Enfin, l'un de nous deux dort et ronfle tandis que l'autre (celle qui n'a déjà pas dormi la nuit précédente) tente vainement de trouver le sommeil.

Le resto du soir rattrape un peu cette première journée désastreuse. Le Kogo Ristorante est un Italien assez chic qui pratique des prix moins élevés que ceux de la plupart des boui-boui français. Un carpaccio, une bruschetta, deux assiettes de pâtes merveilleuses, un verre de Lambrusco et une eau gazeuse nous reviennent moins de 40€. Je concède au moins une chose à Prague: on y mange bien pour pas cher.


samedi 9 mai 2009

Maroc - Marrakech


Quand je me lève, Pascale et Sylvie sont déjà parties. Je suis la prochaine à quitter le riad, mais j'ai encore quelques heures devant moi et l'intention d'en profiter pour terminer mon shopping. Tandis que Doris part chez le coiffeur, Antonia, Valérie, Geneviève et moi reprenons le chemin désormais (presque) familier des souks. Nous retournons au magasin de carnets, puis chez le marchand de théières ou j'avais repéré un joli modèle ancien le premier jour. Je finis par l'emporter pour 250dh, sans trop marchander car il me reste du liquide que je ne pourrai pas rechanger en euros. Quelques jolies cuillères typiques, taillées d'un bloc dans du bois de citronnier, et un petit flacon ouvragé (pour mettre le sable de la page de Sidi Kaoki ramassé jeudi) complètent mes achats. La lumière est très belle ce matin et met joliment en valeur les étalages colorés, mais effrayée par la mésaventure d'hier, j'ai laissé mon appareil photo au riad. Dommage.

Je quitte les filles, qui on rendez-vous avec Doris place Jemma El Fna pour un dernier déjeuner ensemble, et regagne le riad toute seule. A cause d'un camion stationné devant l'entrée du derb, je rate l'endroit où je suis censée tourner à gauche et m'aperçois de mon erreur quand je me retrouve face aux remparts de la medina. Je fais demi-tour et arrive au riad vers 11h, ce qui me laisse le temps de refaire ma valise, de boire un Coca light et de croiser François et sa femme qui rentrent de leur stage de tai-chi. Puis Majoub arrive pour me conduire à l'aéroport. Je repense au trajet fait en sa compagnie il y a huit jours à peine, et à tout ce qui s'est passé dans l'intervalle. La semaine a été riche en enseignements, en découverte et en émotions. Désormais, le tutoiement me vient tout seul (et quelques réflexes de marchandage, aussi). Je dis à Majoub combien j'ai aimé son pays et son peuple, ce qui semble lui faire très plaisir. En me déposant devant l'entrée de Menara, il me prend le visage entre les mains, me serre contre lui et me claque deux bises.

Le trajet du retour est un peu moins agréable. Parce que deux compagnies se partagent mon vol retour vers Madrid et que celui-ci est surbooké, je n'obtiens ma carte d'embarquement qu'à l'heure où ledit embarquement est censé commencer. Et il me reste encore à passer la douane plus le contrôle des passeports. Je suis sur des charbons ardents, craignant de manquer mon premier vol, donc ma correspondance pour Bruxelles, et de devoir passer une nuit de plus à Marrakech ou à Madrid (j'apprendrai plus tard que c'est ce qui est arrivé à Doris et à Geneviève, mais que la compagnie les a logées dans un palace 5 étoiles, ce qui a dû pas mal les consoler!). Mais au final, je réussis à attraper mon avion. Pas mal de turbulences pendant le vol; mon jeune voisin de siège est blême. "No me gusta", m'explique-t-il avec une grimace d'excuse. J'ai trois heures d'attente à Madrid et aucune boutique ne me tente, mis à part un marchand de journaux où j'achète quelques magazines français. Je me pose dans un café où je mange un sandwich au brie (alors qu'il y avait juste marqué "cheese" sur la carte et que le brie est à peu près la sorte sorte de fromage que je déteste) avec des frites froides qui s'avèrent être des Fritelles. Beurk. Le second vol se déroule sans incident, et à l'arrivée vers 22h05, je suis plus que ravie de retrouver Chouchou qui semble avoir passé une semaine difficile en mon absence. La prochaine fois, nous partirons ensemble!

vendredi 8 mai 2009

Maroc - Marrakech


Nous nous levons tôt ce matin pour faire l'ouverture du jardin Majorelle, attenant à la propriété de feu Yves Saint-Laurent et son compagnon Pierre Bergé. Lorsqu'Antonia veut nous prendre des billets couplés avec la visite du musée de l'Islam qui se trouve à l'intérieur, on lui répond que celui-ci est fermé pour rénovation. Les hommes en noir ont encore frappé... Un premier tour d'horizon, puis chacune d'entre nous se choisit un sujet de dessin et un endroit où s'asseoir. Je m'installe face à l'entrée du fameux musée de l'Islam dont la porte m'inspire. Mais les couleurs sont difficiles à rendre; je n'ai pas d'éléments solides pour border convenablement mon aquarelle et les touristes de plus en plus nombreux font bouger le banc sur lequel je suis assise ou regardent par-dessus mon épaule et commentent sans la moindre gêne, ce qui me donne envie de mordre au lieu de continuer à peindre. Je me recroqueville sur mon carnet comme une élève de primaire qui veut empêcher son voisin de copier sur elle.

Avec tout ça, je salope un tracé au feutre pourtant assez réussi. Je suis en train de désespérer quand deux gardiens m'abordent gentiment et engagent la conversation. La jeune femme est originaire d'Essaouira et ravie quand je lui dit que j'ai beaucoup aimé cette ville; je lui montre l'aquarelle que j'en ai faite et elle pousse des exclamations enthousiastes. L'homme est peintre à ses heures perdues, visiblement beaucoup plus doué que moi. Il me donne quelques trucs, change l'eau sale de mon gobelet et m'aide à faire un mélange pour rendre au mieux la couleur des fleurs de bougainvillée. Je lui dis que je suis là avec un groupe, et il s'avère qu'il connaît Antonia: il a même sa carte dans son portefeuille! Malgré mon dessin raté, je suis toute contente de cette rencontre.

Je retrouve le reste du groupe à la sortie, et nous nous dirigeons sous un soleil de plomb vers le Guéliz, un quartier moderne de Marrakech. Effectivement, le contraste avec la medina est énorme. A l'extérieur du rempart, les rues sont moins décrépites et plus propres mais considérablement plus occidentalisées et dénuées de charme - ou d'ombre, en raison de leur largeur. Je ne tarde pas à mourir de chaud et de soif, mais vu que nos doyennes Doris et Geneviève avancent sans piper mot, je trouverais un peu indécent de me plaindre. Tout de même, il doit faire dans les 40° et un petit Coca light serait le bienvenu... Mais avant d'atteindre le café où nous sommes censées déjeuner, Antonia marque un arrêt dans le magasins de sacs dont elle m'avait vanté la beauté. A l'intérieur, que des copies de grandes marques; je reconnais notamment mon Darel bien-aimé, plus le Charlotte à nouettes qui fut la coqueluche des fashionistas il y a deux ans, et le Marc Jacobs qui dort dans ma penderie depuis quatre ans et demie. Le cuir est joli mais je ne suis pas tentée du tout. Par contre, le propriétaire qui (refrain habituel) connaît bien Antonia veut absolument lui acheter le carnet de voyage en noir et blanc qu'elle a réalisé lors de son précédent séjour à Marrakech. Antonia refuse en arguant de la valeur sentimentale de ce carnet, et il finit par lui faire cadeau du petit sac rouge qu'elle voulait acheter "pour la récompenser de son talent". Antonia, c'est la version live de la blogueuse influente finalement.

Nous nous installons au Solaris pour manger de grandes salades. Le pain qu'on nous apporte est rassis, et quand Antonia demande au serveur de nous le changer, celui-ci nous prend de haut, genre "elles sont bien difficiles les touristes cette année". Antonia insiste, et il s'exécute de mauvaise grâce. Un peu plus tard, il nous apporte en cadeau une soupe qui a un sale goût de beurre rance et à laquelle la plupart d'entre nous ne touchent pas. Les salades sont correctes, mais nous les avons attendues trois plombes. Idem pour mon dessert (une magnifique salade de fruits) et les jus ou cafés des autres filles. Nous réglons sans laisser de pourboire. Pendant que j'attends Antonia partie aux toilettes, le serveur commence à débarrasser notre table en grommelant, et je crois bien l'entendre nous insulter.

Nous repartons vers la medina, toujours sous un soleil de plomb (nous apprendrons plus tard qu'il faisait 40° à Marrakech cet après-midi). Au niveau des remparts, nous nous arrêtons au centre artisanal où les articles sont plus chers que dans les souks et où on ne peut guère marchander. Je fais quand même l'emplette d'une mignonne boîte en cuir vieux rose avec un dromadaire embossé sur le dessus, qui sera parfaite pour mettre mes bagues, et d'une troisième paire de babouches (heureusement que je ne comptais pas en acheter). Soudain, en fouillant dans mon sac, je réalise que je n'ai pas mon appareil photo. La dernière fois que je l'ai vu, c'était sur la table du Solaris. Et vu la façon dont ça s'est passé avec le serveur, celui-ci aura sûrement empoché mon Lumix. Adieu, les centaines de jolies phoos prises depuis le début de la semaine! J'en pleurerais. D'ailleurs, j'en pleure un peu. Antonia me rassure: "Les Arabes ne sont pas voleurs: Allah les regarde". Et Valérie utilise gentiment son téléphone (je n'ai plus de crédit dans le mien) pour appeler le Solaris et demander s'ils n'auraient pas trouvé mon appareil photo. Réponse: si!!! Décidément, la chance sourit aux étourdies (renseignements pris, il semble qu'aucune opération frauduleuse n'ait été réalisée à l'aide de ma carte Visa oubliée vendredi dernier dans un distributeur).

Nous repassons au riad boire un thé et nous reposer un peu, puis Antonia et moi retournons en taxi au Solaris pour récupérer mon Lumix. Le soir, nous dînons d'un couscous pas extraordinaire, et en dessert, nous avons droit à deux petits verres remplis, l'un de lait de fraise, l'autre de lait d'avocat, tous deux parfumés à la cannelle. En France, je dirais "J'aime pas" et je n'y toucherais pas. Là, je goûte et je trouve ça délicieux. Il va décidément falloir que je revoie mes préjugés - tous mes préjugés - à la baisse.

jeudi 7 mai 2009

Maroc - Essaouira, Sidi Kaoki


Les msemen du Palazzo Desdemona ne valent pas ceux de Fatma, mais enfin ils devraient nous tenir au corps jusqu'à midi. Nous partons nous promener sur au et pied des remparts d'Essaouira. Le temps est toujours aussi magnifique, bien qu'un peu frisquet en ce début de matinée, et la lumière très belle appelle les photos - mais gare au contre-jour! Les ruelles que nous longeons sont presque désertes; quel contraste après l'agitation de Marrakech... Nous repérons deux belles portes côte à côte et nous arrêtons pour les dessiner. Je m'assois en tailleur à même le sol; Antonia a apporté son siège pliant et d'autres filles squattent une marche devant l'entrée de la maison d'en face. Comme une gourde, j'utilise le mauvais feutre, celui qui a la pointe ultra-fine mais dont l'encre n'est pas résistante à l'eau. Je ne pourrai donc pas aquareller mon croquis avec le fameux bleu d'Essaouira.

Achetant au passage quelques menues babioles pour touristes (mini-babouches, cartes postales, foulards...), nous nous dirigeons ensuite vers la place du marché aux grains où nous sommes déjà passées hier. Nous nous asseyons à la terrasse d'un salon de thé baptisé "Au bonheur des dames", où nous sirotons de délicieux cocktails de fruits. Puis les autres filles se remettent à dessiner, et comme je commence à saturer un peu, je pars me promener dans les environs. Je récupère les babouches achetées hier (désormais munies d'une semelle à ma taille) et retourne seule à la galerie des bijoutiers. Comme je m'enquiers du prix de la bague en forme de fleur qui me plaît tant, et demande à combien il me fait les deux si je lui prends aussi un joli pendentif d'ambre à la monture d'argent délicate, le jeune marchand m'invite à m'asseoir dans sa minuscule boutique et part nous commander un thé à la menthe. En attendant l'arrivée de celui-ci, nous bavardons pendant qu'Abdou nettoie les bijoux de sa vitrine. Il me pose des questions sur mon pays et me demande comment je trouve Essaouira. Evidemment, je n'ai que du bien à en dire. La conversation s'éternise et je crains que les filles ne s'impatientent sur la place, d'autant que nous avons rendez-vous avec notre chauffeur en fin de matinée. Abdou veut que je vienne manger un tajine chez lui ce soir; je lui réponds que je repars aujourd'hui même et me retiens de lui faire remarquer que je pourrais être sa mère. Au final, j'obtiens les deux bijoux qui m'intéressent pour 620 dh au lieu des 680 initialement annoncés, et Abdou m'offre en plus deux petits pendentifs (une babouche et une Khamsa, ou main de Fatima). J'ai passé un moment sympa en sa compagnie et j'en suis toute contente.

A midi et demie, après être repassées à l'hôtel pour récupérer nos bagages, nous retrouvons Rachid et son minibus à l'extérieur des remparts. Une petite heure de route nous conduit à Sidi Kaoki (prononcer Kaouki), un spot de surfeurs assez connu. Nous ne sommes pas là pour mater du muscle huilé, cependant, mais pour dessiner le marabout que la marée haute nous interdit malheureusement de contourner afin de nous placer de son côté le plus lézardé. Après avoir avalé les sandwichs apportés avec nous d'Essaouira, nous nous installons à la terrasse d'un café qui offre une vue moins spectaculaire mais néanmoins satisfaisante sur ledit marabout. Je dessine sur une feuille de mon vieux livre écrit en arabe, utilisant de la gouache blanche pour les faces ensoleillées du bâtiment. Le résultat me plaît bien même s'il coûte la vie à mon verre de Coca projeté à terre par un coup de coude malencontreux.

Vers 15h30, nous reprenons le chemin de Marrakech. Cette fois, le trajet me semble très long. Il fait beaucoup plus chaud qu'à l'aller et avec les vitres ouvertes (le minibus n'est bien entendu pas climatisé), nous avalons beaucoup de poussière et de fumée d'échappement. Les yeux me piquent et le temps se traîne. Nous faisons une halte dans un café où on nous sert un litre de jus d'orange chacune - ce sera un miracle si nous arrivons à dormir ce soir. Le propriétaire demande si nous voulons qu'il rajoute du sucre et s'entend répondre un "non!" choral et retentissant.

Nous sommes rentrés au riad Sahara Nour largement à temps pour le dîner, qui se compose d'une soupe et d'un tride: un plat marocain à base de msemen, de lentilles aux oignons et de poulet. Je me serais bien passée des lentilles qui alourdissent inutilement l'ensemble, mais je suis fan du msemen utilisé comme des pâtes. Après le dessert, nous discutons très tard et rigolons encore pas mal, espérons que ça facilitera notre digestion!